La vie ici est vraiment tranquille. La famille pour laquelle je travaille en tant que fille au-pair possède une petite maison dans une petite résidence composée de onze autres petites maisons toutes identiques, formant un rectangle. A l’intérieur de ce rectangle, un petit jardin avec une piscine commune. On est en Espagne, il ne fait généralement pas moins de 30 degrés à cette époque donc la piscine c’est le must.
Oui mais voilà.
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Voilà, moi, je croyais, quand ils me disaient qu’ils avaient une piscine, qu’elle était de leur propriété privée. Ainsi, cela ne m’aurait pas dérangé de me baigner si seuls eux me voyaient, ainsi que les enfants ou même les amis des enfants.
Une piscine commune, ça change tout. Déjà, vu la configuration de la résidence, tout le monde peut te voir te baigner depuis sa fenêtre de chambre. Ensuite, il n’y a pas que les enfants qui se baignent, il y a aussi tous les parents.
On m’avait dit que les Espagnoles étaient poilues et grasses. Alors je me suis dit, hah, super, je ne serais pas la seule ! Pas de quoi complexer, je peux exposer mes bras de yéti, mes bourrelets au ventre et la cellulite de mes cuisses.
Certes, elles sont poilues… en fait, je ne pense pas qu’elles soient plus poilues que les Européennes du Nord mais elles ont des poils très noirs sur une peau plus ou moins mate ou blanche. Bon d’accord, il y en a qui sont vraiment très poilues- j’ai fait la connaissance d’une maman qui avait un duvet partant des oreilles vers la bouche…
Mais ici, elles sont carrément pas grosses. Ni grasses. Ni flasques. La seule que j’ai vue avec de la cellulite était enceinte.
Le cauchemar. Je me suis retrouvée dans une résidence bourrée de femmes au foyer toutes plus minces les unes que les autres.
Je vous assure que cela a de l’importance quand vous vous sentez moche et grosse, flasque, celluliteuse, vergetureuse, bref, la totale. Je l’avoue, je suis une complexée.
Les complexées ont un problème : leur complexe est parfois une obsession. Il est impossible de les oublier, définition même d’un complexe. Ce qui signifie qu’il est impossible de ne pas penser à son complexe quand il faut le montrer. Car les complexes ne sont complexes que quand les autres peuvent le voir. La solution est donc de les cacher.
Et comment fais-tu pour cacher un complexe telle que les bourrelets et la cellulite ? Tu ne te baignes pas.
Alors me voilà, au soleil, près de la piscine, avec ma mini jupe et mon débardeur, suant à 35 degrés au soleil, pendant que tout le monde barbote gaiement dans l’eau fraîche. Ils me demandent si je ne veux pas me baigner : ‘’non merci, l’eau est un peu froide à mon goût’’. Ce n’est pas entièrement un mensonge, la première fois que je suis rentrée dans la piscine – ou plutôt que j’ai sauté dedans après avoir lâché la serviette juste au bord- je me suis gelée jusqu’à la racine des cheveux.
Mais je préfèrerais quand même nager. Je n’en peux plus, je vais attraper une insolation, je ne vais plus avoir de peau avant la fin du mois à force.
Alors autre solution que de rester comme une idiote au bord de la piscine, et en plus vêtue : je ne sors plus de la maison. Ainsi, voilà que je passe les heures où tout le monde se baigne, dans ma chambre, au sous-sol, loin de la lumière (mais pas loin de la chaleur), toute seule, à taper des imbécillités sur le portable.
En dix jours, je n’ai pas bronzé d’un centimètre de peau.
Si seulement je pouvais oublier que j’avais des bourrelets. Toute autre option n’est pas valable : rentrer le ventre ne fait pas disparaître les bourrelets de côté, à moins d’essayer en même temps de s’allonger et de ne plus respirer- ni la cellulite. Se baigner aux heures où il n’y a personne non plus, il ne fait pas assez chaud et de toute façon ce sont les heures où je m’occupe des enfants. Se baigner en maillot de bain combinaison n’est certainement pas l’option pour avoir l’air moins con.
Conclusion : je suis coincée. Je ne dirai pas je suis coincée dans mon corps ; non, je suis coincée dans ma tête. Car si je ne pensais pas à ses fichus complexes, je m’éclaterais plus, on me prendrait moins pour une fille bizarre (LA fille qui ne se baigne pas) et plus que ça, je serai carrément heureuse car je n’aurais aucun souci dans ma vie vu que actuellement c’est la seule ombre au tableau. Si je pouvais oublier mes complexes, je serais une femme libérée, épanouie. Heureux est celui qui peut oublier ce qu’il ne peut changer.
Mais dis donc, j’y pense, ce que je ne peux changer ? Mais bien sûr alors que je pourrais être heureuse : je vais maigrir pour perdre les bourrelets et faire du sport pour perdre la cellulite. Donc, manger moins et équilibré et courir tous les deux jours…
Ouf, tout un programme.
Euh, finalement je préfère rester dans ma chambre, j’y suis très heureuse. Je ne veux pas crever de faim et faire un jogging, c’est barbare.
Je resterai complexée, et tant pis, je le revendique: Happy is the lazy girl who forgets what she has no courage to change.
(vraiment, cette citation est ridicule, j’ai honte)
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Later that day I got to thinking about relationships... But the most exciting, challenging and significant relationship of all is the one you have with yourself. And if you find someone to love the you you love, well, that's just fabulous.
Carrie Bradshaw
10 juillet 2007
Happy is the man who forgets what he cannot change
La vie ici est vraiment tranquille. La famille pour laquelle je travaille en tant que fille au-pair possède une petite maison dans une petite résidence composée de onze autres petites maisons toutes identiques, formant un rectangle. A l’intérieur de ce rectangle, un petit jardin avec une piscine commune. On est en Espagne, il ne fait généralement pas moins de 30 degrés à cette époque donc la piscine c’est le must.
Oui mais voilà.
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Publié par Caylony 0 commentaires
Thèmes Espagne, Les misères quotidiennes
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